Inspiration #2 Interview de Benoit Quémar - Massaï Concept
16198
post-template-default,single,single-post,postid-16198,single-format-standard,bridge-core-3.0.6,qode-page-transition-enabled,ajax_fade,page_not_loaded,,qode-theme-ver-29.3,qode-theme-bridge,qode_header_in_grid,wpb-js-composer js-comp-ver-6.10.0,vc_responsive

Inspiration #2 Interview de Benoit Quémar

Inspiration #2 Interview de Benoit Quémar

Pour cette 2ème Inspiration c’est Benoît Quémar qui nous fait l’honneur de partager sa vision.

Son regard sur l’économie est aiguisé. Les changements de paradigmes qu’il prônent pour notre économie sont forts et pleins d’optimisme.

Ils s’inscrivent parfaitement dans la vocation de MASSAÏ Concept. L’économie de demain sera plus locale, durable, humaine.

Plongez avec nous dans son analyse. Nous souhaitons que cette interview soit l’esquisse du monde de demain.

Ancien journaliste, Benoît Quémar a plusieurs cordes à son arc : entrepreneur, formateur, consultant international, conférencier et animateur d’ateliers d’innovation.

Benoît Quémar aide les entreprises et leurs dirigeants à s’améliorer tout en trouvant du sens à leurs actions. Il s’appuie notamment sur la force de l’empathie et la démarche du DESIGN THINKING, qu’il vulgarise et applique dans tout secteur.

Benoît Quémard aide les organisations à se recentrer sur leur finalité ou à redéfinir cette dernière pour devenir des entreprises à mission, si ce n’est pas déjà le cas, et ensuite à traduire cette mission dans leurs actions au quotidien.

Ses interventions déclenchent et augmentent l’intelligence émotionnelle et collective, ouvrant la voie à des changements rapides, utiles, pertinents et bien menés, qui favorisent l’émancipation de chacun et la satisfaction au travail.

https://www.massai-concept.com/loffre-massai-transformation-des-entreprises/

1)     Benoît Quémard, quel est ton regard sur la crise traversée par nos entreprises ? Qu’observes-tu ?

Je me félicite que des dirigeants renoncent à leur salaire, totalement ou partiellement, qu’une entreprise comme la MAIF rembourse ses sociétaires compte tenu de la baisse du nombre d’accidents de la route, que des PME fabriquent des masques en tissu ou des pièces pour des respirateurs… bref, que le meilleur de l’Homme se manifeste en période de crise.

« Espérons que la crise nous fasse enfin remplacer le PIB actuel par un PIB social et écologique qui tient compte du coût réel, social et environnemental, de toute activité économique »

Malheureusement, à côté de ces beaux exemples, on déplore aussi le pire avec des trafics divers. Par exemple ces Américains qui détournent des masques destinés à la France sur un tarmac d’aéroport en les payant trois fois plus cher (et les vendeurs ou revendeurs Chinois qui acceptent par appât du gain…).

Quant aux dividendes, il est navrant de voir qu’il faut qu’une crise survienne pour que certains les réduisent enfin. Rémunérer l’actionnaire sur un profit annuel qui ne prend pas en compte le coût global pour la société et la nature de son activité, c’est affligeant.

Espérons que la crise nous fasse enfin remplacer le PIB actuel par un PIB social et écologique qui tient compte du coût réel, social et environnemental, de toute activité économique.

Sinon, la prochaine crise sera pire que celle-là car, plus nous détruisons le monde vivant, plus nous libérons des virus et les laissons passer de l’animal à l’Homme ou du permafrost à l’Homme.

2)     As-tu une belle initiative d’un de tes clients/collègues à nous partager ?

Pas directement auprès de clients ou de collègues car je travaille seul. Mais dans mon réseau LinkedIn j’ai vu par exemple que trois salariés de Marmalab, agence de codeurs de Caen que je connais, ont bénévolement créé en un weekend le socle d’une plateforme Web de commande et de distribution de visières de protection pour du personnel soignant. Decathlon a aussi donné le brevet de son masque de plongée intégral et une entreprise française a conçu et fabriqué rapidement avec une imprimante 3D l’embout qui permet de remplacer le tuba du masque par une sortie vers un respirateur si besoin.

3)     Selon toi, comment peux-tu être utile aux entreprises en ce moment ?

Mes interventions de conseil ou d’animation sur sites sont bien sûr annulées ou repoussées et je ne peux pas les remplacer par des visio-conférences ou pratiquement pas. Mais j’ai la chance aussi de travailler à un projet numérique qui verra le jour dans l’année et qui heureusement ne prend pas de retard car toute son équipe fonctionne en télétravail. Cela dit, je devrais publier quelques conseils ou remarques sur l’empathie et le design thinking car c’est le moment ! :=)

4)     Quels sont les défis auxquels les entreprises vont être confrontées au retour à la normale ?

 

Bien sûr, l’industrie devra redémarrer rapidement alors que des chaînes de production auront été à l’arrêt ou à peine maintenues.

Je pense que le défi sera très important pour le secteur de l’événementiel, qui ne pourra pas rattraper les annulations du printemps voire de l’été puisque ces événements seront alors définitivement perdus et non reportables ou en concurrence avec d’autres dates déjà prévues pour l’automne et l’hiver.

« Nous avons besoin de moins d’avions dans le ciel »

C’est sûrement un des secteurs les plus touchés, avec bien sûr celui des transports et de l’hôtellerie-restauration.

Cela dit, je ne souhaite vraiment pas que le secteur des transports redémarre comme avant car l’augmentation du trafic aérien et routier n’est pas tenable pour la Planète. Nous avons besoin de moins d’avions dans le ciel. Et pourtant, récemment encore le président de l’union des aéroports français demandait déjà dans une interview aux « Échos » une baisse de la fiscalité sur les billets d’avion après la crise ! Il n’a rien compris et témoigne encore d’une vision uniquement financière et à court-terme d’un secteur industriel. À la place, il faut au contraire réduire le nombre de vols et transformer les aéroports.

Il faudra donc relancer l’économie sans reprendre les travers d’avant. Surtout ne pas prendre le prétexte de l’après crise pour bafouer comme l’a fait Trump les normes environnementales et créer une crise encore plus forte derrière.

5)     Quelles actions mettre en place pour les relever ?

À part les actions de soutien des États, je ne vois pas trop. Cela dit, des dépenses qui étaient accessoires vont devenir inutiles faces à des dépenses devenues indispensables et ce sera une bonne chose si les entreprises, comme les ménages, se concentrent sur ce qui est essentiel à leur activité et au bien-être de leur personnel.

« J’espère que la crise nous aura appris de distinguer le futile de l’utile »

Autrement dit, des fournisseurs de biens ou de services essentiels vont – et c’est normal et tant mieux – être privilégiés face à des fournisseurs de biens ou de services secondaires ou futiles.

« Orientons nous dans une frugalité intelligente, une consommation locale et utile »

Si la crise nous débarrasse de choses inutiles comme de vouloir à tout prix le dernier modèle de téléphone mobile ou des fastes pour impressionner des clients, ce sera pour le mieux. L’avenir, c’est la frugalité, pas l’expansion. Et bien sûr il faudra privilégier les fournisseurs locaux par ses achats et des mesures d’incitation fiscale.

6)     Pour toi, qu’est-ce que la crise va changer dans l’organisation du travail ?

Ceux qui étaient réticents au télétravail, notamment chez les dirigeants et parfois bêtement au risque de lui privilégier le présentéisme (j’en connais un notamment…), auront j’espère compris son intérêt, même si bien sûr le télétravail n’est pas la panacée ni un souhait pour tous, évidemment.

Nous avons besoin de relations sociales et de contacts réels, mais il est aussi contreproductif de vouloir à tout prix travailler tout le temps sous le même toit. Ce sera, j’espère, un bénéfice de la crise. L’autre, bien sûr et nous l’avons déjà évoqué, sera de se recentrer sur l’essentiel et de favoriser la production et la consommation locale de biens et services.

7)     De ton point de vue, quels sont les enseignements pour demain ? C’est quoi le monde d’après ?

Le monde d’après, si on peut rêver, sera celui du village et de la proximité. La mondialisation n’est utile, et bien sûr à encourager, que pour l’ouverture à autrui et l’absence de conflits ; elle est parfaitement inutile et néfaste pour la Planète quand elle conduit à délocaliser ce qui ne devrait pas l’être ou à consommer des choses venues du bout du monde.

Il est impensable et devenu criminel de manger quelque chose qui vient de loin ou hors-saison, à part ponctuellement et en petite quantité ; des oranges, du café ou des épices par exemple.

« Remplaçons la mondialisation inutile, quand elle nous rend dépendant de la Chine ou d’ailleurs au détriment de nos industries nationales, par une ouverture intelligente au monde, à la coopération et à l’entraide internationales, mais couplées avec une production et une consommation locales »

Tout comme il est impensable de faire faire en Chine du matériel de première urgence et de soins ou de défense. Pas du tout par chauvinisme ou patriotisme mal placé, mais pour limiter les déplacements, la consommation d’énergie et pour être autosuffisant en cas de crise comme celle du Covid-19. Les entreprises qui avaient commencé à relocaliser leur production en France en ayant compris que le coût réel – pour elles ou pour la Terre – de la production lointaine, était plus élevé que prévu ou la qualité moins bonne, vont maintenant être suivies par celles qui relocalisent pour ne pas souffrir en cas de crise ; et c’est tant mieux.

« Aujourd’hui nous célébrons le personnel soignant ; demain, rappelons-nous de faire pareil avec tous les métiers et de respecter et de favoriser l’autre quel qu’il soit : son interlocuteur, son collègue, son fournisseur, son client – éprouvons de l’empathie pour autrui dans notre travail et dans nos vies »

La fermeture en 2018 de l’usine de fabrication de masques de Plaintel en #Bretagne, parfaitement documentée par Radio France dans une enquête récente, montre comment son propriétaire américain de l’époque a pris des décisions imbéciles pour favoriser un profit à court terme. On le paie cher aujourd’hui… Heureusement, la crise aura ouvert les yeux de beaucoup et même du président de la République qui a déclaré mi-mars: « Déléguer notre alimentation, notre protection, notre capacité à soigner, notre cadre de vie à d’autres est une folie. »

Quant à l’Homme, j’espère qu’il aura compris lui aussi deux choses :

  • Encourager la mondialisation inutile en achetant ce qui vient de loin n’a plus aucun avenir. Vive les frontières ouvertes, vive la fraternité, vive les collaborations internationales, le partage de brevets, vive l’Europe forte et unie, mais vive les fabrications locales et la réduction absolue des transports inutiles de biens et de services !
  • Nous avons tous besoin les uns des autres et « l’autre » est important. Aujourd’hui, le personnel soignant, la police, les pompiers, les livreurs, les boulangers, etc. sont à l’honneur et c’est bien mérité. Demain, il faudra toujours s’en souvenir et traiter « l’autre » comme soi-même, qu’il soit client, fournisseur, collègue, partenaire, même supérieur, etc. Éprouver de l’empathie pour l’autre, se mettre à sa place, concevoir son offre pour lui, le respecter, le servir, c’est la clé d’une production ou d’une prestation réussie, de trouver un sens à son travail et la satisfaction de faire quelque chose de bien, de remplir une mission utile à la société. Quand je reprendrai mes ateliers ou mes conférences sur le leadership et le management, j’aurai moins besoin d’expliquer l’empathie et ses bénéfices à mon public !

Enfin, espérons-le, mais il faudra aussi faire attention à ne pas laisser les égoïsmes refaire surface pour ceux qui voudront « reprendre la main » comme avant la crise…

retrouver l’interview de Benoît Quémar sur  https://www.linkedin.com/in/stéphane-nobre-massai-concept/

Voir aussi l’interview de Philippe Breton : https://www.massai-concept.com/inspiration-1-interview-de-philippe-breton/